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Lucho Herrera : du maillot à pois au sang sur les mains ?

Icône du Tour de France, Herrera est aujourd’hui soupçonné d’avoir payé des hommes armés pour éliminer quatre paysans. Leurs corps auraient été enterrés sur sa propre propriété.

Luis « Lucho » Herrera, ancien champion cycliste colombien et légende des cols du Tour de France, est aujourd’hui au cœur d’un scandale judiciaire retentissant. Considéré comme un héros national pour ses victoires à L’Alpe d’Huez en 1984 et sur la Vuelta en 1987, il est désormais accusé d’avoir commandité l’assassinat de quatre de ses voisins pour s’approprier leurs terres.

Les faits reprochés remontent à octobre 2002, dans une région rurale proche de Fusagasugá, où Herrera possédait une ferme. Selon des témoignages recueillis récemment, il aurait remis deux enveloppes à des paramilitaires du groupe Autodefensas Campesinas del Casanare, contenant des photos de ses voisins et une somme de 40 millions de pesos, soit environ 8 000 euros. Les victimes, Gonzalo Guerrero Jiménez, Víctor Manuel Rodríguez Martínez, José del Carmen Rodríguez Martínez et Diuviseldo Torres Vega, étaient tous de modestes paysans vivant à proximité de la propriété de l’ancien coureur. Herrera les aurait désignés comme membres présumés des FARC, les accusant de préparer son enlèvement, pour justifier leur élimination.

L’enlèvement aurait été mené dans une Toyota Hilux beige, avec des hommes déguisés en agents du DAS, utilisant des badges et des gilets officiels pour légitimer l’opération. Les quatre hommes ont été capturés en soirée, puis transportés jusqu’à une parcelle appartenant à Herrera.

Selon le témoignage du paramilitaire surnommé Menudencias, les corps des victimes auraient été égorgés et découpés à la machette, avant d’être enterrés dans deux fosses creusées à même le sol, sur la route entre Novilleros et La Aguadita. Les exécutions ont été présentées avec un niveau de détail particulièrement macabre, laissant peu de place au doute sur la violence des faits. L’un des témoins clés, connu sous le nom de Ojitos, a affirmé que les ordres venaient directement de Herrera, alors lié à Martín Llanos, chef du groupe paramilitaire local. Il aurait assuré au groupe que ces « guérilleros » représentaient une menace pour lui et que leur disparition était une mesure de sécurité.

Ce n’est qu’après les exécutions que les paramilitaires auraient appris que les victimes n’étaient en réalité pas liées aux FARC, ce qui alimente l’hypothèse d’un mobile foncier pur et simple. Le parquet colombien qualifie désormais ces meurtres de crime contre l’humanité, ce qui les rend juridiquement imprescriptibles.

Un premier jugement est tombé : Ojitos a été condamné à 22 ans de prison, et une enquête a été officiellement ouverte contre Lucho Herrera. Le tribunal de Fusagasugá a transmis le dossier au procureur général, qui envisage une procédure d’envergure. Interrogé par les médias colombiens, Herrera a nié toute implication directe, affirmant qu’il collaborerait avec la justice et qu’il était en contact avec son avocat pour se présenter devant les autorités compétentes. Il n’a toutefois pas fourni d’explication précise sur ses liens avec les groupes armés.

L’affaire jette une ombre terrible sur l’image de cet ancien champion, autrefois symbole de la réussite sportive colombienne. Ce dossier illustre aussi les liens troubles entre certaines élites rurales et les groupes armés pendant les années de guerre civile en Colombie.

Guillaume Eckendoerffer

Rédacteur web passionné de true crime, j’explore et raconte au quotidien les affaires criminelles marquantes et celles qui font l’actualité. Curieux et attentif aux détails, j’aime plonger dans les enquêtes pour en comprendre tous les aspects et les retranscrire de manière accessible.

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