Dans la nuit du 25 au 26 juin 2005, Mathilde Croguennec, 18 ans, disparaît lors du Teknival de Carnoët, un festival de musique techno rassemblant plus de 43 000 participants. Le lendemain matin, deux festivalières découvrent son corps sans vie dans une sapinière, à 200 mètres du site principal. La jeune femme est à moitié dénudée et porte les stigmates d’une agression d’une violence inouïe : 28 coups de couteau, dont certains mortels, et une profonde entaille à la gorge.
Les enquêteurs déploient immédiatement un dispositif exceptionnel. Des milliers de véhicules sont contrôlés, des déchets passés au peigne fin et des vidéos examinées. Les analyses ADN effectuées sur un couteau et un emballage de préservatif retrouvés sur place révèlent un même profil masculin, mais restent sans correspondance dans les bases de données.
L’affaire connaît un tournant en mai 2006, lorsque deux photos prises lors du Teknival sont diffusées par les enquêteurs. Sur ces clichés, un homme apparaît aux côtés de Mathilde. Identifié par un ancien camarade de la marine, il est reconnu comme étant Alain Kernoa, 26 ans, un ancien marin ayant servi sur la Jeanne-d’Arc.
Le 22 juin 2006, Kernoa est arrêté au domicile de ses parents alors qu’il revient d’un voyage en Pologne. Confronté aux preuves ADN, il finit par avouer le meurtre. Selon son récit, il aurait initialement frappé Mathilde à deux reprises avant de la poursuivre et de la poignarder à 28 reprises. Il tente ensuite d’avoir un rapport sexuel avec la victime, avant de commettre des attouchements post-mortem.
Lors de l’instruction, Kernoa avance une justification troublante, évoquant une confusion entre la réalité et les jeux vidéo dont il est passionné. Les experts psychiatriques le décrivent comme un individu manipulateur et potentiellement dangereux.
En septembre 2008, son procès devant la cour d’assises des Côtes-d’Armor s’ouvre. La douleur des proches de Mathilde est immense, notamment celle de sa mère qui témoigne d’un deuil insurmontable. Son père, quant à lui, est décédé avant la fin de l’instruction, « mort de chagrin » selon son avocat.
Confondu par son ADN et incapable d’expliquer son geste, Kernoa est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour assassinat et tentative de viol.
En 2010, il fait appel de cette condamnation. Lors de son second procès devant la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine, sa défense, assurée par Me Éric Dupond-Moretti, plaide l’absence de préméditation. La thèse d’un accès de violence sous l’effet de l’alcool et des stupéfiants est mise en avant. Après plusieurs jours de débats, la cour requalifie les faits en meurtre et non en assassinat, écartant ainsi la préméditation.
Le verdict tombe : Kernoa est condamné à 30 ans de prison, dont 20 ans incompressibles. Une peine jugée plus sévère que la perpétuité initialement prononcée, en raison de la période de sûreté accrue.


