À Düsseldorf, au début des années 1920, une tension sourde s’installe dans les rues. Des crimes atroces, d’abord isolés, commencent à rythmer la vie nocturne de la ville. Les premières victimes, souvent des jeunes femmes ou des enfants, sont retrouvées mutilées dans des terrains vagues ou au bord du Rhin, laissant les autorités locales désemparées face à l’ampleur de la violence.
L’année 1929 marque un tournant glaçant. Une fillette de cinq ans, Christine Klein, est retrouvée étranglée et égorgée dans son lit, un meurtre d’une sauvagerie qui glace la population. Peter Kürten, un ouvrier apparemment sans histoire, rôde pourtant dans l’ombre, se délectant du chaos qu’il provoque. Les semaines suivantes, la ville sombre dans la peur. Plusieurs femmes sont agressées dans les parcs publics ; certaines survivent et décrivent un homme au regard fixe et aux gestes méthodiques, un portrait-robot que la police criminelle peine à exploiter. L’atmosphère devient étouffante, les rues se vident à la nuit tombée.
En mai 1930, Gertrud Albermann, âgée de 10 ans, disparaît après avoir été vue jouant près d’un terrain vague. Son corps est retrouvé quelques jours plus tard, marqué de dizaines de coups de couteau. Cette découverte pousse les enquêteurs à faire appel à des experts en profilage criminel, une pratique encore balbutiante en Europe. La chasse à l’homme s’intensifie, mais Kürten, rusé, déjoue chaque piège tendu par la police. Il change fréquemment d’apparence et cible ses victimes au hasard, rendant son identification presque impossible. La presse le surnomme bientôt le « Vampire de Düsseldorf », en référence aux morsures relevées sur certaines victimes.
Un jour d’été, Kürten commet une erreur fatale. Il aborde Maria Budlick, une jeune femme égarée, et tente de la violer. Mais Maria réussit à s’enfuir et trouve refuge au poste de police judiciaire. Son témoignage précis, décrivant l’agresseur et le lieu de l’attaque, offre aux enquêteurs une piste tangible pour la première fois.
Rapidement, l’étau se resserre. La police identifie Kürten grâce aux indications de Maria et à un travail de filature patient mené dans les quartiers populaires. Le 24 mai 1930, Peter Kürten est arrêté sans opposer de résistance, comme s’il attendait cet instant depuis longtemps. Lors de son interrogatoire, il avoue avec un calme glaçant une série de meurtres, décrivant avec précision les moindres détails de ses attaques. Les experts psychiatriques, appelés en renfort, diagnostiquent chez lui une forme extrême de sadisme mêlé à des pulsions sanguinaires irrépressibles.
Son procès, en avril 1931, se transforme en un spectacle macabre. Face aux jurés, Kürten décrit ses crimes avec une froideur déroutante, captivant une salle d’audience médusée. La cour d’assises le condamne à mort après un procès aussi bref qu’implacable.
Le 2 juillet 1931, Peter Kürten est guillotiné à Cologne, mettant fin à l’un des chapitres les plus sombres de l’histoire criminelle allemande. L’après-midi même, des centaines de curieux se pressent devant la prison pour apercevoir les lieux où a été exécuté le « Vampire ».


