Dans la paisible banlieue de Portslade, non loin de Brighton, la vie semblait suivre son cours sans heurt. Pourtant, derrière les apparences, une tragédie se nouait. Shana Grice, jeune femme de 19 ans à l’avenir prometteur, venait de renouer avec son amour de jeunesse, Ashley Cooke, rompant ainsi une liaison discrète avec Michael Lane, collègue de travail et amant éconduit. Ce dernier, incapable d’accepter cet abandon, sombra dans une obsession dévorante. Les premiers signes d’alarme furent discrets. En février 2016, Shana reçut des fleurs anonymes et découvrit sa voiture endommagée. Elle alerta la police du Sussex, espérant trouver protection. Dans l’ombre, Lane perfectionnait son emprise : un dispositif de traçage fut posé sur le véhicule de Shana, réduisant son quotidien à une angoisse silencieuse.
Les semaines s’assombrirent. Le 24 mars, Michael Lane, emporté par une rage froide, arracha le téléphone de Shana et la saisit brutalement par les cheveux. Une plainte fut déposée, mais contre toute attente, la jeune femme se retrouva elle-même sanctionnée d’une amende de 90 livres pour « perte de temps de la police », conséquence tragique d’une erreur de jugement liée à leur ancienne relation.
La spirale du harcèlement s’accéléra. Le 9 juillet, Lane pénétra chez Shana à l’aide d’une clé volée et l’observa longuement, tapi dans l’ombre de sa chambre. Malgré un enregistrement accablant et une plainte formelle, l’affaire fut classée avec une simple remontrance pour vol. Dans les jours suivants, des appels anonymes, ponctués de respirations sinistres, vinrent troubler les nuits de la jeune femme, mais son désarroi resta lettre morte. Le 12 juillet, Shana croisa à nouveau la silhouette menaçante de Lane. La police, sourde à son effroi, classa encore une fois l’affaire, la qualifiant de « risque faible ». Lorsque, le 4 août, elle aperçut Lane rôdant près de son domicile, Shana, lassée d’être ignorée, choisit le silence, redoutant d’être à nouveau blâmée.
Puis vint le 25 août 2016. Dans la moiteur d’un après-midi d’été, alors que ses colocataires étaient absents, Shana fut surprise par Lane, qui, cette fois, n’avait plus d’autre dessein que la mort. Il l’égorgea avec une froide détermination, avant d’incendier sa chambre pour effacer les traces de son forfait. C’est Ian Cooke, le père de son petit ami, qui, en forçant la porte, découvrit l’horreur : Shana gisait, sans vie, dans un décor de cendres et de sang. Rapidement interpellé sur son lieu de travail à Burgess Hill, Lane tenta d’échapper à la vérité, invoquant une macabre coïncidence. Mais les preuves, accablantes, balayèrent ses dénégations : des recherches Internet troublantes, des traces ADN, des enregistrements glaçants.
En mars 2017, le procès de Michael Lane s’ouvrit au Lewes Crown Court. Tandis qu’il plaidait coupable de harcèlement mais niait le meurtre, le jury, implacable, le déclara coupable. Il fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, avec une période de sûreté de 25 ans. Dans un verdict empreint de gravité, le juge Nicholas Green dénonça l’aveuglement de la police du Sussex, incapable de discerner le danger, prisonnière de stéréotypes dévastateurs. L’enquête révéla qu’au fil des années, 13 autres femmes avaient déjà signalé le comportement menaçant de Lane, sans que des mesures décisives ne soient prises.
La colère monta d’un cran lorsqu’un rapport du Bureau Indépendant pour la Conduite de la Police (IOPC) révéla des fautes graves. Trois officiers furent poursuivis pour manquement au devoir. Parmi eux, PC Jon Barry Mills démissionna avant son audience disciplinaire, tandis que Trevor Godfrey échappa à toute sanction, ayant quitté ses fonctions.
Brisés par la perte de leur fille, Sharon Grice et Richard Green dénoncèrent publiquement l’attitude des forces de l’ordre, accusant celles-ci d’avoir traité Shana comme une suspecte plutôt que comme une victime.
