L’air glacé de Lincoln, dans le Nebraska, semblait déjà chargé d’électricité ce 1er décembre 1957, quand Charles Starkweather, jeune homme aux airs rebelles, abattit pour la première fois. À seulement 19 ans, il tue un employé de station-service, Robert Colvert, après une altercation autour du prix d’un nounours en peluche. Cet acte isolé n’alerte pas immédiatement les forces de l’ordre, encore loin d’imaginer la vague de violence à venir.
Les semaines passent dans une inquiétude sourde, jusqu’à ce qu’en janvier 1958, la fureur de Starkweather éclate à nouveau. Cette fois, il entraîne avec lui Caril Ann Fugate, sa petite amie de 14 ans, dans une spirale sanglante. Leur première victime est la famille Fugate elle-même : Caril prétend que Starkweather l’a contrainte sous la menace, mais ses parents et sa demi-sœur de deux ans sont retrouvés assassinés dans leur maison barricadée. La ville, encore engourdie par l’hiver, commence à frissonner sous les avertissements de la police locale. Mais Charles et Caril ont déjà pris la fuite, sillonnant les routes désertes du Nebraska. Dans une ferme isolée, ils ôtent la vie à August Meyer, un vieil ami de la famille Starkweather. Les enquêteurs retrouvent le corps près de son cheval, lui aussi tué d’une balle.
Sur leur passage, les jeunes fugitifs croisent Robert Jensen et Carol King, deux adolescents qu’ils assassinent froidement après une tentative de vol de voiture. Le drame se noue dans les replis silencieux d’une école abandonnée où les corps sont découverts, réveillant une panique sourde dans les campagnes environnantes. La traque s’intensifie et des barrages routiers sont mis en place dans tout l’État.
Sans répit, Charles et Caril pénètrent dans la maison cossue de C. Lauer Ward et Clara Ward, figures respectées de Lincoln. En quelques heures d’effroi, ils assassinent le couple ainsi que leur domestique, Lillian Fencl. L’horreur culmine lorsque les enquêteurs, accourus sur place, découvrent l’élégance saccagée de la demeure et les marques d’une violence incontrôlée. À bord d’une Packard volée, Starkweather se dirige vers le Wyoming, mais son errance se termine brutalement près de Douglas, lorsque le shérif Earl Heflin engage une course-poursuite mémorable. Attrapé après avoir simulé une blessure pour susciter la pitié, Charles est finalement arrêté sans résistance. Caril, quant à elle, se rend peu après, clamant son innocence avec une voix brisée par l’épuisement.
Le procès, très médiatisé, débute quelques mois plus tard. Starkweather, décrit par les experts en criminologie comme un psychopathe narcissique, revendique ses crimes sans remords. Sa froideur face au tribunal glace l’audience. Caril Fugate, elle, lutte pour convaincre le jury qu’elle était sous emprise ; elle est néanmoins reconnue coupable et condamnée à la prison. En juin 1959, Charles Starkweather est exécuté sur la chaise électrique, dans l’enceinte de la prison d’État du Nebraska. Son visage figé, presque paisible, hante encore les couloirs de la mémoire collective. Caril, après 17 ans derrière les barreaux, retrouve la liberté en 1976, silhouette discrète d’une survivante d’un drame national.


