Sous l’apparence anodine d’une maison modeste du nord de Philadelphie, au 3520 North Marshall Street, se tapissait un secret d’une noirceur insoutenable. C’est entre ces murs ordinaires que Gary Michael Heidnik, ancien militaire et autoproclamé pasteur de l’Église des Ministres de Dieu, érigea un véritable sanctuaire de l’horreur.
Lorsque Josefina Rivera, jeune femme de 25 ans, monte dans la voiture de cet inconnu le 25 novembre 1986, elle n’imagine pas que cette décision bouleversera sa vie à jamais. Dans le sous-sol de l’habitation, Heidnik l’enchaîne sans un mot, l’abandonnant à l’obscurité glacée d’une fosse bétonnée creusée de ses propres mains. Rapidement, la sinistre collection humaine s’agrandit. Sandra Lindsay, Lisa Thomas, Deborah Dudley, Jacqueline Askins et Agnes Adams seront elles aussi capturées, chacune attirée par des promesses illusoires, chacune piégée dans ce cachot improvisé où l’air même semblait vicié par la souffrance.
La méthode de Heidnik, implacable et raffinée dans sa monstruosité, révèle une maîtrise glaçante du contrôle psychologique. Privées de nourriture, battues, violées, les captives sont forcées de se battre entre elles pour un quignon de pain. Celles qui déplaisent sont soumises à des sévices plus cruels encore : électrochocs, privations d’oxygène, et longues périodes d’enfermement sous des planches clouées sur la fosse. La tragédie atteint son paroxysme lorsque Sandra Lindsay, affaiblie jusqu’à l’épuisement, succombe dans le silence du cachot. Heidnik, déterminé à effacer toute trace, mutile le corps et le dissimule dans un congélateur étiqueté « nourriture pour chien ». Selon certains témoignages, il ira jusqu’à mélanger la chair de la jeune femme à la pitance destinée aux autres prisonnières.
La folie du geôlier semble sans limite. Un soir de mars 1987, sous la lueur crue d’une ampoule vacillante, il ordonne l’exécution de Deborah Dudley. Submergée d’eau dans la fosse, électrocutée par des câbles dénudés, la jeune femme périt dans une obscurité humide, avant d’être sommairement enterrée dans une forêt reculée du New Jersey.
Alors que le piège semble se refermer inexorablement sur elles, un frémissement d’espoir naît dans l’obscurité. Gagnant peu à peu la confiance de son ravisseur, Josefina Rivera parvient à obtenir la permission de quitter la maison, sous prétexte de recruter une nouvelle captive. Dès sa sortie, elle se précipite vers une station-service et compose, d’une main tremblante, le numéro de la police.
L’intervention est immédiate. En pénétrant dans les entrailles nauséabondes de la maison, les enquêteurs découvrent un tableau d’horreur : chaînes rouillées, fosses puantes, morceaux de chair oubliés dans des sacs plastiques. La stupeur est totale, même parmi les agents les plus aguerris.
Au cours de son procès, la défense tente de plaider la démence, arguant de l’instabilité mentale de Heidnik. Mais l’accusation démontre avec brio qu’il savait parfaitement ce qu’il faisait, gérant un portefeuille financier florissant de plus d’un demi-million de dollars avec une froide rationalité. Le verdict tombe, implacable : Gary Heidnik est reconnu coupable de meurtres, d’enlèvements, de séquestration et de viols en série, et condamné à mort. Le 6 juillet 1999, dans l’enceinte feutrée de la prison d’État de Rockview, l’aiguille de l’injection létale met fin à ses jours. Dans une ironie macabre, Heidnik demeure à ce jour le dernier condamné exécuté en Pennsylvanie.
