Sous le ciel tranquille de La Bastide-Clairence, petit village du Pays basque, rien ne laissait présager le drame qui allait déchirer une famille et bouleverser une communauté. En ce dimanche 5 juin 2016, Matthieu Rouxel et sa femme Catherine s’apprêtent à partager un déjeuner en famille, dans leur maison à la façade blanche, lorsque tout bascule. Une altercation éclate entre leur fils Kévin, 27 ans, et eux. Ce qui n’était qu’un repas ordinaire vire alors à l’irréparable.
Soudain, dans un accès de violence glaçante, Kévin saisit une arme à feu. Il tire à bout portant sur son père, le tuant sur le coup. Sa mère, Catherine Rouxel, est atteinte par une balle perdue alors qu’elle tente de s’interposer, avant de succomber à ses blessures. Dans la panique, sa compagne Sofyia M., 25 ans, reste sur place et aide son compagnon à maquiller la scène, en tentant de faire croire à un cambriolage qui aurait mal tourné. Le couple quitte rapidement les lieux. Le cadavre de Matthieu Rouxel est retrouvé affalé sur une chaise, celui de son épouse à quelques mètres, gisant sur le sol de la salle à manger. L’émotion est vive à La Bastide-Clairence. Les gendarmes de la section de recherches de Pau, épaulés par les techniciens en identification criminelle, relèvent rapidement des incohérences sur les lieux.
L’hypothèse d’un cambriolage est écartée. Les indices matériels, notamment l’absence d’effraction et le comportement des chiens de la maison, mènent les enquêteurs à suspecter une implication familiale. En garde à vue, Kévin Rouxel craque au bout de quelques heures. Il avoue les faits, tandis que Sofyia admet avoir aidé à dissimuler le double meurtre.
Très vite, le mobile s’éclaire : Kévin reprochait à ses parents un climat oppressant et des reproches incessants, nourrissant une rancune latente. Ce ressentiment, allié à une personnalité instable et à la consommation de stupéfiants, compose un profil psychologique complexe, décrit par les experts comme narcissique, dépendant, et dangereux.
Le procès devant la cour d’assises de Pau s’ouvre en mai 2019. Dans un silence lourd, Kévin apparaît frêle, mutique, laissant son avocate peiner à rendre audible son désarroi. Sofyia, quant à elle, tente de se distancer de l’acte, évoquant la peur et la sidération. Les témoignages des proches dépeignent un couple replié sur lui-même, fuyant toute interaction familiale ou sociale. Les débats révèlent la préméditation : l’arme avait été achetée peu avant le crime, et les messages retrouvés sur leurs téléphones confirment une montée en tension inquiétante. La cour souligne l’emprise psychologique qu’exerçait Kévin sur Sofyia, mais rappelle que celle-ci aurait pu agir autrement.
En première instance, la justice condamne Kévin à 30 ans de réclusion criminelle, assortis d’une peine de sûreté de 20 ans. Sofyia écope de 20 ans pour complicité d’assassinat. Un verdict accueilli avec soulagement par les proches des victimes, mais qui ne dissipe pas la douleur. En appel, en février 2022, la tension est palpable. Le couple comparait séparément. Cette fois, leurs versions divergent, leur alliance judiciaire s’effrite. Kévin se dit trahi, Sofyia affirme avoir été manipulée. Le jury confirme les peines prononcées en première instance, entérinant la responsabilité des deux accusés.


