L’affaire Paul Bernardo et Karla Homolka, surnommés sinistrement les « Ken et Barbie du crime », demeure l’un des chapitres les plus dérangeants de l’histoire criminelle canadienne. À première vue, ils incarnaient le couple parfait : beaux, jeunes, apparemment sans histoires. Mais derrière les sourires de façade se dissimulait une mécanique perverse, une spirale de violence et de domination qui allait plonger le pays dans l’horreur.
Entre 1987 et 1990, la banlieue de Scarborough est le théâtre d’une série d’agressions sexuelles d’une rare brutalité. Les victimes, des jeunes femmes, sont attaquées à la nuit tombée. Le « violeur de Scarborough » sème la peur, échappant avec une inquiétante aisance aux forces de l’ordre, malgré des descriptions et des portraits-robots diffusés à grande échelle.
La rencontre entre Paul Bernardo et Karla Homolka, en octobre 1987, scelle le destin de plusieurs innocentes. Lui, vendeur charismatique, dissimule une âme de prédateur. Elle, technicienne vétérinaire, est fascinée par sa noirceur. Rapidement, leur relation glisse vers une obsession macabre, faite de manipulations, de jeux de pouvoir et de fantasmes meurtriers.
Le premier drame se joue dans l’intimité du foyer familial. Le soir du 24 décembre 1990, Tammy Homolka, la cadette de Karla, est droguée à son insu, violée pendant qu’elle est inconsciente, puis laissée sans soins. La jeune fille meurt étouffée, officiellement des suites d’une intoxication alcoolique. La vérité, elle, reste enfouie derrière des mensonges soigneusement orchestrés.
Quelques mois plus tard, la noirceur de leurs pulsions prend une tournure encore plus glaçante. Leslie Mahaffy, 14 ans, est enlevée alors qu’elle rentre chez elle. Séquestrée, humiliée, violée, elle est finalement tuée. Son corps est découpé, dissimulé dans des blocs de béton et jeté dans un lac. Ironie macabre : ces restes seront découverts le jour du mariage de Bernardo et Homolka.
Le cycle infernal se poursuit. En avril 1992, Kristen French, 15 ans, est abordée en pleine rue. Le piège se referme en quelques secondes. Pendant trois jours, elle est soumise à des sévices abominables. Sa mort est lente, et méthodiquement planifiée. Son cadavre est retrouvé deux semaines plus tard, abandonné dans un fossé.
Pendant ce temps, un élément clé dort dans un congélateur judiciaire : un échantillon d’ADN fourni par Paul Bernardo dès 1990. Il faudra attendre décembre 1992 pour que les analyses médico-légales établissent enfin le lien entre lui et le violeur de Scarborough. Une lenteur administrative que beaucoup ne pardonneront jamais.
Le 17 février 1993, l’étau se referme. Bernardo est arrêté. L’homme, désormais suspect dans une série de viols et de meurtres, est confronté à une avalanche de preuves accablantes, dont des vidéos des sévices infligés aux victimes. Karla Homolka, en échange d’une peine allégée, livre un témoignage détaillé. Son accord avec la Cour, surnommé plus tard le « pacte avec le diable », indigne l’opinion publique.
En 1995, Paul Bernardo est condamné à la prison à perpétuité pour les meurtres de Leslie Mahaffy et Kristen French. Il est déclaré criminel dangereux, ce qui rend pratiquement impossible toute libération conditionnelle. Homolka, de son côté, purge une peine de douze ans, puis recouvre la liberté en 2005, loin des caméras mais non de la controverse.





